En surfant sur le net, mon attention fut attirée par un superbe Saint-honoré surmonté d’un dôme en sucre dont la réalisation m’intriguait.
Cherchant à en savoir plus, j’appris que ce dôme est originellement dû à J-F. DEGUIGNET, Mof pâtissier, mais, malgré mes recherches, rien sur la mise en œuvre.
A l’évidence, il y avait là une énigme que je me proposais de résoudre à la première occasion.
Restait à réfléchir sur les caractéristiques techniques et les aspects pratiques de la mise en œuvre pour me permettre d’émettre une hypothèse dont la mise en ouvre prendrait en compte mes moyens « techniques »..
Les liminaires :
La réalisation doit être facile, rapide et reproductible par un employé ne maitrisant pas forcément toutes les techniques de l’art du sucre.
- J’imagine que s’agissant d’un travail commercial, celui-ci est forcément soumis à ces contraintes en l’absence du chef pâtissier.
Le sucre est parfaitement transparent d’où :
- Tout étirage, qui satinerait le sucre et lui conférerait un aspect brillant et opaque, est exclu.
- Le sucre est cuit à une température relativement basse afin d’éviter tout risque naturel de jaunissement. J’imagine utiliser du fondant et du glucose, mais le cassant du produit final me fait choisir un sucre classique. J’opte pour une température de cuisson de 150 degrés qui, par ailleurs, correspond à une cuisson plutôt classique pour le sucre soufflé.
- Reste à régler le problème du graissage. Un graissage à la crème de tartre, ajouté en début de cuisson, me semble le plus approprié mais, ne disposant plus de ce produit, j’opte pour l’acide tartrique dont je possède en grande quantité. Par contre, l’acide devant être mis en début de cuisson (l’acide tartrique, puissant, s’ajoute généralement en fin de cuisson pour un sucre à satiner) sa quantité doit être très faible pour ne pas créer trop d’inverti (résultat trop souple ou ne cristallisant pas assez rapidement). Je choisis d’en mettre 5 gouttes par kilo de sucre.
Le sucre est très fin d’où :
- Toute manipulation est exclue car la chaleur de la main pourrait déformer la boule de sucre. Le sucre doit, aussi, être refroidi très vite ou maintenu « en forme » pendant le temps de refroidissement.
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Le dôme n’est pas réalisé à partir d’une boule de sucre
- Une boule de sucre devrait être coupée à chaud pour former le dôme à poser sur le gâteau. C’est inenvisageable !
- J’envisage plutôt un travail à partir d’une plaque ou d’un disque de sucre.
- La finesse de la paroi peut permettre de penser que le sucre est cuit, refroidi, pulvérisé et saupoudré sur la feuille de cuisson avant d’être refondu au four. Cette technique, fréquemment utilisée avec l’Isomalt pour confectionner des sujets fins, est difficilement envisageable. D’une part je ne dispose plus d’Isomalt, d’autre part, avec un sucre traditionnel, le risque de recristallisation du sucre après refonte est très élevé. De toute évidence, le sucre doit être coulé très chaud pour avoir une « crêpe de sucre » très fine. Je choisis de cuire le sucre puis de l’affiner immédiatement en le faisant couler sur le Silpat, tenu verticalement.
En partant de l’hypothèse qu’il s’agirait d’une plaque de sucre, j’ai 3 options :
a) Souffler : Je pourrais utiliser une plaque « soufflante » sur laquelle je maintiendrais la crêpe de sucre. Reste à résoudre les questions du maintient du sucre sur la plaque (étanchéité parfaite) et des risques de déformation du sucre à chaud. Il faudrait maîtriser la pression de l’air, c’est peu réaliste et peu pratique eu égard à la finesse du résultat et des matériels dont je dispose. En outre, toute différence d’épaisseur du disque risquerait d’entraîner une déformation du dôme (faiblesse au niveau de la paroi) et nuirait à la parfaite régularité constatée sur les photos que j’ai vues. Je peux imaginer, à ce stade, un dome « tombant » plutôt que « montant » sous la pression de l’air. Plus simple à envisager, il faut résoudre le point « étanchéité. Pas évident à cause de la pression qui pourrait décoller le sucre se son support.
b) Pousser le sucre avec un cul-de-poule par exemple: C’est la technique employée pour réaliser pas mal de choses et notamment des « verres » en sucre,. Difficile à envisager avec une telle finesse au niveau du résultat pour les raisons déjà évoquées.
c) Aspirer : La chose me parait beaucoup plus réaliste, voire évidente compte tenu de mes contraintes. Je ne dispose pas de machine à mettre sous vide. Par contre, je peux en créer une très facilement en bricolant avec ce que j’ai sous la main.
Il n’y avait donc pas, à mon niveau et avec mes moyens techniques, plusieurs façons de faire. J’émis l’hypothèse d’une mise en forme par vide d’air et me promis de la réaliser dès que possible.
LE MATERIEL
J'ai utilisé un cache pot en céramique (solide il ne se déformerait pas) et j'ai fait passer un tuyau en plastique au travers d'un bouchon.
J'ai assuré une parfaite étanchéité avec de la colle thermofusible.
J'ai ensuite recouvert le cache-pot avec 2 feuilles de film alimentaire.
Ces feuilles sont destinées à se galber sous l'action de l'aspiration de l'air et de la chaleur, ce qui permettra au sucre de prendre sa forme.
LA RECETTE (pour 1 kilo de sucre)
En fonction de la quantité désirée, il faudra faire une règle de 3
1 kilo de sucre
400 gr d’eau
300 gr de sirop de glucose (DE moyen : 38 à 40)
5 gouttes d’acide tartrique (ou 1/2 cuillère à café rase de crème de tartre) - L'acide est facultatif, on peut s'en passer facilement, il apporte juste un peu plus de souplesse au sucre mais présente l'inconvénient d'accélérer son "remouillement".
Dans l'autre recette, je n'en n'ai pas mis -
Dans une casserole parfaitement propre (si possible frottée au gros sel) et adaptée au feu sur lequel elle est posée, mettre l’eau, le sucre et l’acide et porter à ébullition.
Ajouter le sirop de glucose et cuire à 150 degrés en nettoyant souvent les parois avec un pinceau trempé dans l’eau froide. (Pour éviter que les particules de sucre projetées sur les parois de la casserole brunissent, colorent la masse, et engendrent des risques de recristallisation inopinée)
A 150 degrés, tremper une seconde le fond de la casserole dans l’eau froide et laisser débuller.
Quand toutes les bulles ont disparu, couler sur une feuille de plastique alimentaire (je vous conseille des feuilles professionnelles Silpat ou Exopat qui ne se déforùment pas sous l'action de la chaleur) et étaler le sucre le plus finement possible en tournant la feuille, verticalement, dans tous les sens. Ne pas étaler le sucre en le frottant, il recristalliserait.
Quand le sucre a légèrement refroidi et qu'il commence à légèrement cristalliser sur les bords de la « crêpe », retourner la feuille de plastique et la poser, côté sucre, sur le film alimentaire recouvrant le support (ici, un cache pot).
Retirer le « Silpat » d’un geste sec (sinon il va coller à la feuille), bien appliquer le sucre sur les bords du support et aspirer immédiatement l’air.
Sous l’action de la chaleur, le film alimentaire va se ramollir et grace au vide d’air et à la dépression, le sucre va se mettre en forme. L'effet est immédiat.
Bloquer immédiatement l’air afin de maintenir le sucre en forme (sinon l'élasticité du film va le déformer... j'ai plié le tuyau et l'ai maintenu plié avec une pince-étau) et entreposer au frais jusqu’à refroidissemnet total du sucre (10 minutes environ selon l’endroit).
Procéder délicatement à la « remise de l’air » et souffler par le tuyau pour décoller le film de son support.
Découper éventuellement le bas du dôme avec un couteau chaud (comme pour un ruban en sucre) et poser le dome sur le gâteau.
Pour réaliser ma coupe en sucre, j'ai utilisé exactement la même technique en utilisant un entonnoir (25 cm de diamètre) et j'ai laissé "mordorer" le sucre.
J'ai fait un disque de sucre un peu plus épais (le sucre doit résister si on pose quelque chose dans la coupe) et j'ai fait le vide d'air -
Ensuite, j'ai utilisé la "coupe supérieure" de mon premier dôme pour poser et coller la seconde coupe en sucre - Le collage se fait en faisant légèrement fondre le sucre du socle sur une poêle chauffée -Décor glace royale et perles en sucre -
La forme du dôme épouse la forme de son"moule" et toutes les formes (en tout cas une grande quantité) sont envisageables. Avec cette méthode, on peut très facilement imaginer des dômes en sucre de bases carrées, ovales, rondes, rectangulaires en variant la forme du "moule" où sera formé le sucre et modifier très facilement le volume du dôme en jouant sur le niveau d'aspiration de l'air.
A la suite de mon article sur mon blog, en 2013, JF DEGUIGNET a eu l'immense gentillesse de me contacter et de m'indiquer sa technique.
Dans la mesure où celle-ci figure sur le net (You Tube), je ne pense pas trahir un secret en vous donnant, aujourd'hui, la façon de réaliser, et de réussir, ce magnifique dôme en sucre.
DOME EN SUCRE (ici diamètre 16 cm)
Huiler légèrement un cercle à entremet puis l'entreposer au congélateur environ 1 heure avant de réaliser le dôme.
Recouvrir généreusement un saladier (ici cuve du batteur) avec 6 à 8 feuilles de film alimentaire.
Dans une casserole, mettre 50 g de sirop de glucose, 100 g de sucre et 60 g d'eau. On a besoin de moins de sirop mais pour la mise en œuvre, il est plus simple de cuire une quantité plus importante de sucre - Le surplus peut servir pour confectionner un autre dôme ou être transformé en caramel -
Fondre doucement le sucre puis augmenter le feu et cuire le sucre à 157/160° - Si besoin de colorer le sucre, ajouter le colorant alimentaire lorsque le sucre est à 140° - Le cas échéant, on peut pousser la cuisson jusqu'au caramel -
NB : Nettoyer régulièrement, pendant la cuisson, les parois de la casserole avec un pinceau trempé dans de l'eau froide afin que les particules de sucre accumulées sur les bords ne viennent pas colorer la masse en brulant.
Quand le sucre est à température, le laisser "débuller" hors du feu pendant environ 1 minute -
Poser le cercle à entremet au centre du saladier, sur le film alimentaire, puis couler une partie du sucre à l'intérieur du cercle (ne pas mettre tout le sucre, ce qui ferait trop) -
Laisser refroidir le sucre pendant 1 bonne minute
Des 2 mains, appuyer fermement sur les bords du cercle à entremet. Sous l'action de la chaleur, le film alimentaire va s'assouplir, le sucre va se répartir à l'intérieur du cercle et un dôme de sucre va se former -
Maintenir le cercle enfoncé jusqu'à cristallisation totale du sucre (10 minutes environ) -
Retirer le cercle puis enlever le dôme de sucre avec précautions et le réserver à température ambiante jusqu'à utilisation (l'opération est délicate) -
Ne pas placer au frigo dont l'humidité ferait fondre le sucre, fragile.
Published by Bernard DAUPHIN, … - PREPARATIONS DE BASE
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